un garçon et une fille désirent aider leur ami ou quand on donne on reçoit

un p'tit brin d'Amour

Chapitre 1. Le secret d’Eliot.

- Moi, je cours plus vite que toi !
 Ouf, il m'a fait peur ! Pourtant, je devrais le connaître à la fin Luigi. Il fait toujours ça quand il a une idée derrière la tête. Il se jette dans mes jambes, l'air gauche et vindicatif. Et moi, je marche à chaque fois. Bon, s'il veut faire une course après tout, pourquoi pas ? - Le premier qui touche le pied de la femme sur l'affiche là-bas, il a gagné. OK ? - OK ! - 1, 2, 3... Top !
 Tout de suite, on a le souffle coupé. Faut dire qu'on part à fond dès le signal de départ, comme des tarés. On se rue en avant, nos jambes suivent comme elles peuvent, comme si nos vies dépendaient de cette poursuite. De dos, ça doit être du joli. Qu'est-ce qu'on va pas se chercher comme souci quand on est petit !
 On arrive en même temps. Je devrais plutôt dire qu'on se fracasse en même temps contre le mur. On est en nage. Et mon copain, il est content. - C'est vrai qu't'as pas de mère ? me jette un Luigi abrupt. S'il veut me remercier pour la course, y peut mieux faire. - Tout le monde a une mère, je lui réponds. C'est biologique ! - Ben, elle est où la tienne ?
- Elle est pas là mais j'en ai une. C'est forcé, je te dis !
- Et pourquoi elle est pas là alors ? Luigi a pris son air buté des mauvais jours. Il doit être gêné de faire l'espion mais je le connais bien et il ne me lâchera pas maintenant. Fallait bien que ça arrive un jour !
 Je réponds rien. On continue de marcher côte à côte. Il faut que je trouve vite quelque chose à dire sinon on va se trimballer le silence jusqu'à la maison. Ça y est, le mal au bide recommence. Bon, d'accord, j'ai le ventre qui me tiraille tous les soirs. Mais ce soir, je sentais que j'allais y échapper avec l'air du printemps et les feuilles toutes neuves. Parfois ça marche. Ben là ce soir, c'est raté ! J'ai le trajet de gâché ! - Viens, on va s'asseoir. Luigi n'en mène pas large. On se trouve un coin de trottoir pas trop sale et, les baskets dans la rigole, je lui avoue que ma mère est malade. - Elle a quoi ? - Les nerfs. 
Ça a pas l'air de lui convenir. Il regarde fixement les saletés s'amonceler sur sa chaussure. A cause du barrage. Et il continue à faire son air piteux. - J'peux pas t'expliquer plus, Luigi, je comprends rien moi non plus. Sans me regarder, il commence à trier ce qu'il vient de trouver en faisant le mur avec sa chaussure. D'un côté, les cochonneries et de l'autre, ce qui peut servir. Un gros clou, une portière de voiture Kinder, une petite pièce jaune. De loin, on voit arriver une canette de coca qui semble douée de vie tellement elle tressaute. - Et si on jouait au foot avec ?
 Bien sûr, il répond pas. Pas folle la guêpe !
 Bon, c'est mon ami, on s'est déjà raconté pas mal de choses, j'ai plus qu'à cracher le morceau. 
Oppressé mais presque soulagé, je lâche ma bombe. - Y'a longtemps maintenant, un soir en rentrant de l'école, j'ai buté sur deux costauds en bas de l'immeuble. Ils tenaient chacun un bras de ma mère. On aurait dit qu'ils partaient en promenade tous les trois. J'ai cru que c'était des amis. Mais je me suis rappelé tout de suite que mes parents n'avaient pas ça en magasin. Késako alors ces zozos ? Dès qu'elle m'a aperçu, ma mère m'a envoyé son grand rire gai en pleine figure. - Ce n'est rien ! N'aie pas peur Eliot ! Je vais revenir.
 Bing dans mon ventre. Dès que les grands disent qu'y faut pas avoir peur, c'est sûr que c'est grave. Les types regardaient droit devant eux, loin au dessus de ma tête. - Qu'est-ce que t'as fait ? souffle Luigi tout en continuant à s'occuper de ce qui se passe dans le caniveau. - Tout à coup, y'a eu plus personne alors j'ai foncé dans l'escalier la tête en feu jusqu'à chez moi. La porte était ouverte, mon père était assis sur une chaise. Je lui ai crié plein de choses. Il ne m'a pas répondu. Il était recroquevillé à l'intérieur de sa tête.
 On n'a plus jamais parlé de ça...
 Depuis, on vit tous les deux, chacun dans sa chambre. extrait Corinne Brisco